31/07/2007

L'avenir de l'industrie culturelle est en ligne, mais elle préfère l'ignorer

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

Deux ans après le début des hostilité, allons-nous assister au second round de la bataille réglementaire autour des contenus culturels ? c’est la question qu’on peut se poser au vu des déclarations suivant le conseil des ministres du 25 juillet dernier et la mise en place d’une commission chargée de rechercher des solutions d’endiguement du piratage, avec à sa tête Denis Olivenne, PDG de la FNAC de son état et endigueur patenté.


Cela ne suffisait donc pas d’avoir subit un débat pénible, vexatoire, dangereux et qui accouche d’une loi impraticable et déjà dépassée par les événements. On pouvait penser, lors de la présidentielle, que la nécessité de remettre à plat la question faisait consensus. Mais non, retour aux réflexes les plus simplistes, à ceux de la répression stupide et surtout à une lecteur non-économique de la situation.
Il est en effet de notoriété publique maintenant que la baisse des ventes de disques est moins liée au piratage qu’à une profonde évolution du marché au sens de ce que les consommateurs sont prêts à acheter. Quand par ailleurs la lecture se limite aux seuls chiffres de vente de musique et en éludant les transferts vers d’autres biens culturels, il est certain qu’on n’est pas près de la vérité.
Entre 2002 et 2006, en Europe, le nombre d’internaute a augmenté de 50% mais celle des ceux qui disent télécharger de manière illégale a elle baissé de 18 à 14%. Certes, cela fait 2,8 millions de français que la DADVSI proposait de mettre en taule, mais l’écrasante majorité des internautes français est donc légaliste.
Le fond de l’affaire est pourtant bien connu, l’économie culturelle des bien dématérialisée est en mutation avancée. Or, pour l’industrie du disque et presque aussi pour celle de l’audiovisuel, les trains sont déjà passés et maintenant elle subit. Pour s’en convaincre, deux lectures tombent parfaitement à propos. D’abord, l’excellent dossier de Courrier International (n°873). On y trouvera une véritable autopsie du secteur, qui explique comment l’industrie du disque a raté le train en 2003 (Napster ndr) et surtout des articles exceptionnels car dans le concret de la révolution en marche, auprès des artistes qui ont fait le choix de modèles économiques numériques et qui s’en portent très bien. Au-delà des pionniers que sont Prince ou Peter Gabriel, on y lira ces exemples d’artistes qui mettent sur la table jusqu’à 300k€ pour casser leurs contrats afin de gagner la liberté du réseau. Qui a dit que la culture ne se finançait pas on-line ?
Et puis ça grouille de bonne idées là-dedans. Faire de la co-création avec les fans ou établir la tournée en fonction de où ils se trouvent, en passant par la confirmation que, même si c’est gratuit, les internautes sont prêts à dépenser 1,30$ sur le site de l’artiste, soit 40% de plus que les 0,99$ qu’ils pourraient payer sur iTunes. Les gens aiment les artistes et sont prêts à aider ceux qu’ils aiment. Ce qu’ils veulent c’est du lien, de la relation et plus une logique d’album tous les deux à trois ans avec une tournée entre. Cette année, la vente de single en ligne a atteint celle des albums, un format appelé à disparaitre.
Le dossier fini avec MySpace, le réseau social d’pù sont déjà sorti un paquet de découvertes, le cas le plus connu étant celui des Artic Monkeys. Mais en France, on a d’abord Skyblog et on lira donc l’interview de Pierre Bellanger dans Télérama (n°3002), qui parle de nouvel age d’or et de Skyblog Musique qui devrait transformer la blogosphère préférée des ados français en écosystème musical.
Alors plutôt que de dépenser de l’énergie à empêcher une mutation économique inévitable à l’industrie culturelle, à faire comme s’il ne se passait rien, il vaudrait mieux accompagner sa reconversion et soutenir les artistes qui eux, ont bien compris qu’ils avaient tout intérêt à se prendre en main. Le piratage n’est pas le centre du problème.

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